Laila Ouardad, pour l’amour du sifflet
18 octobre 2013Issue d’une famille nombreuse et sportive, dès son plus jeune âge Laila Ouardad passe ces week-ends dans les salles de sport. Alors, quand son club de l’époque (AL la Source) la sollicite pour arbitrer, c’est sans réfléchir et avec enthousiasme qu’elle accepte. Dix-huit ans plus tard, elle fait partie des 6 meilleures arbitres féminin de l’hexagone.
Retour sur le parcours d’une passionnée de basket.
D’abord joueuse, Laila a toujours aimé être en contact avec la balle orange. Alors dès l’âge de 14 ans, elle n’hésite pas à prendre le sifflet. Une formation « sur le terrain » qui lui a de suite plu. D’ailleurs elle le conseille aux clubs :
« Quand tu as plus de 10 gamins à l’entrainement, et qu’au moment de jouer, tu en as qui sont assis à ne rien faire, ce serait bien qu’il participe eux aussi, d’une façon différente, au match. Peut-être que plus tard, certaines décisions arbitrales seront mieux comprises ».
C’est ainsi qu’en attendant d’avoir 16 ans et pouvoir passer ses diplômes officiels, Laila joue ou arbitre ! A l’époque, son envie d’arbitrer s’intensifie avec l’aide de Djilali Amrani, Jacques Boué (tous 2 arbitres de haut niveau) et Marc Grassin (ancien arbitre de haut niveau) :
« Ils m’ont pris sous leurs ailes et m’ont beaucoup apporté » précise-t-elle.
Ironie du sort, Marc Graffin a la particularité d’avoir été le plus petit arbitre de la Pro A (« mais un des meilleurs » selon elle) et Laila ne mesure qu’1m53… d’ailleurs à ce sujet, elle sait qu’au début elle a du prouver qu’elle méritait d’être là. Maintenant c’est différent car elle est reconnue et plus personne n’y prête attention. Même si son envie de siffler est toujours présente, sa progression est par la suite ralentie :
« J’adore arbitrer mais j’aimais aussi beaucoup jouer. Il est plus facile d’arbitrer à 35 ans que de jouer en championnat de France, alors à l’époque, j’ai fait ce choix. Par la suite, en passant le niveau suivant, j’ai pu allier les deux…» explique-t-elle.
En effet, joueuse le dimanche après-midi, Laila officiait sur les parquets de NM3 et de NF2 le samedi. Compétitrice avant tout, elle ne comptait pas s’arrêter en si bon chemin :
« J’ai toujours voulu avancer et progresser dans ce que j’entreprends».
Et c’est à 29 ans qu’elle obtient son 3ème niveau. Un « grade » qui lui permet de siffler en LFB et NM1. Pour son 1er match, Laila est désigné sur un match de coupe de France entre Limoges et Bordeaux, un baptême de feu qu’elle n’est pas prête d’oublier :
« Arbitrer Limoges à Beaublanc c’était juste énorme ! En plus, en face, c’était Bordeaux avec Boris Diaw. Une première que je n’oublierai jamais».
A contrario, son pire souvenir est une blessure contractée après 5 minutes de jeu
« Heureusement que c’était sur le dernier match de la saison et qu’il n’y avait aucun enjeu pour les équipes, car mon collègue a du faire tout le match seul…».
Une blessure imputée au rythme de sa vie :
« Enchaîner l’arbitrage, les matches et mon travail, ça a été compliquée. »
En effet, cette conseillère clientèle la semaine, décide alors de lever le pied et de ranger (ponctuellement) ses baskets au vestiaire, le temps que son genou s’en remette. Pour s’organiser, elle n’hésite pas à poser des jours pour pouvoir arbitrer mais dans l’ensemble, elle s’arrange.
« Comme nous recevons les convocations bien en avance, ça me laisse le temps de m’organiser. Ce qui est difficile c’est qu’en décidant d’arbitrer, la vie sociale en prend un coup. La semaine je suis au travail, le soir (3 fois/semaine) je m’entraîne –ce qui me permet de me maintenir en forme- et le week end je pars arbitrer ».
En 8 jours, Laila a enchaîne plus de 1800 kilomètres pour siffler 4 matches (Open LFB, Blois et Tarbes)
« Quand on aime on ne compte pas. J’ai déjà fait pire mais c’est vrai que le mois d’octobre est chargé avec 9 rencontres… » indique-t-elle.
Laila ne s’en plaint pas puisqu’elle aime ce rythme, d’autant plus lorsque les salles où elle officie sont pleines
« J’aime aller dans une salle comme le Prado par exemple, parce que les gradins sont toujours remplis, ce qui est agréable. En plus, en général, le basket qui y est produit est plutôt plaisant… ».
L’arbitre reste avant tout une joueuse amoureuse du beau jeu :
« Il n’y a pas qu’à Bourges que ça joue ! Il y a beaucoup d’équipes qui produisent de belles choses, ce que j’aime aussi ce sont les derbys, particulièrement ceux du Nord, car l’ambiance est toujours au rendez-vous ! ».
Pour revenir à son statut de joueuse, il est légitime de se demander si ce n’est pas trop dur de jouer en NF3 et donc d’y accepter certaines décisions arbitrales, elle nous répond :
« Ah nan, pas du tout ! Je fais la part des choses, lorsque je joue je ne m’occupe que de mon jeu. Et, la plupart du temps, je tempère les réactions de mes partenaires envers les arbitres. L’erreur est humaine ! Moi, je me remets sans cesse en cause. Nous sommes les garants du règlement alors certes, nous pouvons faire des erreurs mais il faut les reconnaître et être dans le dialogue. A partir de là, en général, cela se passe bien. »
Certes mais il n’y a que 5 femmes qui arbitrent à ce niveau et une seule qui siffle au plus haut niveau français (Carole Delaune, NDLR). A ce jour, une seule femme à arbitrer un match masculin aux Jeux Olympiques, Chantal Julien. Cette dernière s’explique sur son statut dans un papier du nouvel Observateur qui est repris sur le site de l’AFCAM (association française du corps arbitral multisports) et elle pense que « dans le basket, il faut être plus fort que les hommes. Il est plus difficile de se faire respecter quand on est une femme. Sans une grosse personnalité, ce n’est même pas la peine d’entrer sur le terrain. » Interrogée sur la question, Laila est moins catégorique
« Je ne ressens pas de discrimination particulière ! Lorsque nous mettons notre tenue, nous sommes arbitres et ce, homme ou femme. Il n’y a aucune distinction de faite au niveau de nos instances dirigeantes ! Si je ne siffle pas encore en Pro A et/ou Pro B, c’est parce que je n’ai pas encore le niveau et/ou que je manque encore de régularité. Mais je travaille pour y arriver ! »
Un objectif dont nul doute qu’il sera atteint pour cette formatrice labellisée FFBB et avec « beaucoup de travail et d’humilité » la cadette des Ouardad devrait atteindre son but !
Photo : Romain Chaïb
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